DABAPHOTO représente depuis la première édition en 2014 un programme d’échanges et de réflexions sur la photographie au sens large, à partir du Derb El Ferrane, pendant un mois.
DABAPHOTO représente depuis la première édition en 2014 un programme d’échanges et de réflexions sur la photographie au sens large, à partir du Derb El Ferrane, pendant un mois. Alors que DABAPHOTO se définit désormais comme LA plateforme photographique du 18, elle serait bien ambitieuse de prétendre à un état des lieux au sens strict de la photographie. La raison en est simple: nul ne saurait, en si peu de temps, parcourir l’océan des états du photographique aujourd’hui. C’est donc une chance, car la grandeur des terrains à découvrir vient avec la nouveauté (et l’originalité sans doute !) des questions. DABAPHOTO s’est voulue une approche par petites touches, une sorte de méthode en pointillés qui articule autour d’un sujet, une exposition collective, une programmation publique et des contenus à caractère éducatif : talks, conversations, projections, workshops. Appelons cela un format.
Pourtant, DABAPHOTO 1, 2, 3 et 4 ont connu les contributions d’artistes, de photographes, d’écrivains, de galeristes, de critiques et de curateurs et rien qui ne soit à la fois tout à fait nouveau pour le photographique et tout à fait négligeable pour Marrakech. Depuis l’édition inaugurale, la plateforme a abordé tour à tour : la circulation des images, la méthodologie du portfolio, l’histoire sous le prisme des maîtres maliens, le livre de photographie, le carnet de voyage (DABAPHOTO 1) ; le genre photographie de rue, les tactiques du regard dans l’espace public, le paysage, (DABAPHOTO 2) ; la photographie dans les récits d’archives et donc dans le façonnage de la memoire, le fanzine comme outils d’(auto)édition (DABAPHOTO 3) et ; cette année, une variation hors des sentiers de la discipline purement disciplinaire qui nous amène vers le fait et l’imaginaire d’un territoire géographique pour dévoiler, questionner, apostropher ! Les possibilités sont larges. Rien donc qui ne soit une révolution, sauf une urgence à mettre en relation l’exercice et la pensée du photographique avec les circonstances artistiques, sociales, politiques de son émergence. Il s’agit d’une première certitude, voire d’un truisme.
Il y avait, en effet, dans l’élan fondateur de DABAPHOTO la volonté perceptible de contextualiser la photo, entre les transformations de l’ère désormais connue sous le qualificatif de post-photographique, ou dite “de la photographie post-internet” — entre ces transformations donc, et le journal des pratiques photographiques ici et maintenant. Ce qu’énonce sans ambiguïté le préfixe “DABA” de l’arabe dialectal signifiant “maintenant”. Dans la même perspective, il va sans dire que si les innovations transdisciplinaires et l’actualité des questionnements nous imposent un “general awareness and advocacy” — si l’on veut bien m’accorder cet anglicisme forcé — les dispositifs (programmes, scripts, agencements, etc.) possibles de la photographie sont infinis. C’est une seconde certitude.
C’est autour de ces deux certitudes que DABAPHOTO se construit, c’est à dire autour d’un potentiel infini du contexte et d’un potentiel tout aussi infini du traitement. L’avenir est donc radieux, car pour la première édition, nous introduisons CHERGUI, un objet éditorial encore non identifié, né de manière organique comme le 18 même, et nommé d’après l’exposition principale. Nous avons pensé que l’élément discursif ajouterait à nos certitudes, et contribuerait aux histoires en pointillés que DABAPHOTO rassemble. CHERGUI sonnait comme une composante naturelle dans la poétique que véhicule cette quatrième édition : le vent de l’Est. Mais attention, nous n’avons pas su être exhaustif ni représentatif. De plus, nous admettons, maintenant que vous êtes en train de lire ce texte, avoir accordé (étant charrette !) une priorité au dispositif. Quoi de plus noble pour la suite maintenant qu’il est en place ? Que le vent de l’Est porte nos rêves de multilinguisme, de prose et d’analyse, nos rêves d’itinérance, de digressions et d’abîme.
Yvon Langué